En 2021, Milorad Dodik, président de la Republika Srpska, entité serbe de la Bosnie-Herzégovine, a annoncé son retrait des institutions fédérales, y compris le fisc, la justice et l'armée. S'il mène cette séparation à bien, pourra-t-on encore considérer la Bosnie-Herzégovine comme un pays souverain ?
La genèse de la Bosnie-Herzégovine actuelle
La Bosnie-Herzégovine était jusqu'en 1992 l'une des républiques constituantes de la république fédérale de Yougoslavie. Son histoire antérieure, et en particulier son occupation par les Ottomans jusqu'en 1878, en fait un territoire particulièrement divers au niveau ethnique (Croates, Bosniaques et Serbes) et religieux (catholiques, musulmans et orthodoxes). Cette diversité en a fait, lors de l'éclatement de la Yougoslavie, la cible de mouvements irrédentistes et le terrain de nombreux combats et massacre (dont le plus connu est celui de Srebrenica) jusqu'aux accords de Dayton de 1995.
Les institutions des accords de Dayton
Les accords de Dayton, signés en 1995, ont mis fin à la guerre en instaurant un système complexe visant à ce que toutes les communautés soient représentées dans le système politique du pays. Pour cela, le pays a été divisé en deux :
-la fédération de Bosnie-et-Herzégovine, à majorité bosniaque et croate;
-la république serbe de Bosnie (Republika Srpska), à majorité serbe.
Ces deux entités assurent en outre un condominium sur le district de Brčko. La présidence est assurée par 3 co-présidents, un de chaque communauté.
La Bosnie-Herzégovine reste-t-elle souveraine ?
La division de la Bosnie-Herzégovine peut être comparée à celle de l'Irak, divisé depuis 2005 (officiellement) entre le Kurdistan irakien autonome et le reste de l'Irak. Le Kurdistan dispose d'un haut degré d'autonomie, avec en particulier sa propre armée et sa propre politique aux frontières. Cependant, le gouvernement de Bagdad a refusé en 2017 le résultat du référendum en faveur de l'indépendance du Kurdistan, conduisant à un conflit militaire qui
montre les limites de la souveraineté dont il disposait. Dans le cas de la Bosnie, on peut aussi noter l'ingérence en cours de forces étrangères : l'Union Européenne continue d'y envoyer des troupes de maintien de la paix, et il y a également une intervention directe dans les processus politiques via le Haut représentant international, ainsi que dans la justice, 3
membres de la Cour constitutionnelle étant étrangers et nommés par la CEDH. On peut également mentionner l'usage d'une monnaie alignée sur l'euro.
Ainsi on peut s'interroger sur le caractère souverain de la Bosnie-Herzégovine, mais les accords de Dayton restent bénéfiques dans la mesure où ils ont permis d'apporter la paix.
Par M. SERGENT
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