
Une mise en retrait du pouvoir local face à des puissances religieuses en quête de légitimité
Au cœur des enjeux politiques et sociétaux de Jérusalem se trouve le maire actuel qui représente le pouvoir local dans cette ville en tension, Avi Cohen, une figure du Parti Likoud (représentant la droite politique en Israël). Depuis sa victoire aux élections municipales de 2018, Cohen a consolidé sa position au sein de la municipalité, bénéficiant du soutien fervent de la base conservatrice traditionnelle de la ville, notamment dans les quartiers ouest où le Likoud jouit d'une popularité de plus en plus importante. En plus du soutien de son propre parti, Cohen a également obtenu l'appui de divers groupes nationalistes et religieux influents, dont des organisations de colons israéliens et des mouvements religieux, partageant sa vision politique axée sur la promotion des intérêts juifs à Jérusalem.
Dans ce contexte, la présence et l'influence des Juifs russes émigrés à Jérusalem ont ajouté une autre dimension à la dynamique géopolitique de la ville. Historiquement enclins à soutenir des partis politiques de droite, les Juifs russes ont contribué à façonner le paysage politique local. Une partie de ces émigrés compose la frange la plus traditionaliste du judaïsme.
Cependant, le mandat de Cohen n'a pas été sans controverses. Ses politiques de développement urbain ont été critiquées pour favoriser les intérêts des colons israéliens au détriment des Palestiniens de Jérusalem-Est, contribuant ainsi à une fragmentation sociale et à des tensions croissantes dans la ville. De plus, sa gestion des affrontements entre les communautés juives et arabes, ainsi que ses positions sur les revendications palestiniennes à Jérusalem-Est, ont été soumises à un examen minutieux et ont alimenté les divisions déjà existantes.
Pourtant, malgré les efforts du maire Cohen pour maintenir l'ordre et la stabilité dans une ville marquée par des tensions persistantes, ses politiques et prises de position ont souvent été perçues comme favorisant les intérêts israéliens au détriment des Palestiniens, fragilisant ainsi les perspectives de paix et de coexistence pacifique à Jérusalem.
En définitive, le rôle du maire dans la gestion des affaires municipales reflète les réalités géopolitiques complexes de Jérusalem, où les intérêts politiques, religieux et culturels se heurtent et s'entremêlent dans une quête perpétuelle de légitimité et de sécurité.
Une variations des acteurs et de leurs capacités à imposer leur pouvoir légitime
Nous venons d’aborder la question du maire de Jérusalem, il est politiquement du même bord que la plupart des dirigeants israelien (bien qu’ils soient fortement influencé par les branches les plus radicales de la Knesset car il y a très peu de siège dans cette assemblé, ce qui impose des coalitions avec des parties extrêmes) donc nous n’aborderons pas le pouvoir national. Pour autant nous allons parler d’une forme, meme si elle est contesté par certains groupe, d’expression du pouvoir palestinien : le Comité de suivi palestinien.
Il s’agit d’un organe de coordination et de représentation des Palestiniens, en particulier à Jérusalem-Est. Composé de membres de divers secteurs de la société palestinienne, y compris des leaders politiques, des responsables communautaires, des représentants religieux et des activistes de la société civile, le Comité de suivi vise à défendre les intérêts et les droits des Palestiniens dans la ville. Cela comprend la sensibilisation politique, la mobilisation sociale, la fourniture de services communautaires et l'organisation de manifestations et de protestations pacifiques. Le Comité de suivi agit également comme un forum pour discuter des défis auxquels sont confrontés les Palestiniens de Jérusalem et pour formuler des stratégies de réponse collective.
Ces acteurs politiques varient souvent et sont sensibles aux variations des mouvements au jour le jour. Il ne faut pas oublier pour autant les dirigeants religieux qui sont influants sur de plus longues périodes et qui participent aux jeux de pouvoirs dans la ville. On observe dans la ville de Jérusalem :
Grand Rabbin d'Israël - Actuellement Yitzhak Yosef, qui a une influence sur la communauté religieuse juive à Jérusalem
Waqf musulman - L'institution religieuse musulmane qui gère l'Esplanade des Mosquées, dirigée par des autorités religieuses musulmanes
Custode franciscain de Terre Sainte - Le représentant de l'Église catholique romaine qui gère de nombreux sites chrétiens à Jérusalem
Patriarche grec orthodoxe de Jérusalem - L'autorité religieuse grecque orthodoxe qui exerce une influence sur les fidèles orthodoxes à Jérusalem
Grand Mufti de Jérusalem - La plus haute autorité religieuse musulmane sunnite à Jérusalem, chargée de questions religieuses et spirituelles pour les musulmans de la ville
Tous les acteurs cherchent à se faire entendre et mettre en avant leurs influences.
Les manifestations massives qui ont eu lieu en Israël, notamment à Tel-Aviv, Haïfa et Jérusalem, ont joué un rôle crucial dans la mobilisation des citoyens et dans la pression exercée sur les décideurs politiques. Ces manifestations ont été des moments significatifs où les citoyens ont exprimé leur désaccord et leur inquiétude face aux politiques et aux orientations du gouvernement israélien, marqué par une coalition comprenant des partis d'extrême droite et ultraorthodoxes. En janvier 2023, la place Habima de Tel-Aviv était noire de monde, avec plus de 50 000 personnes rassemblées, marquant ainsi la mobilisation la plus importante depuis des années. À Haïfa et à Jérusalem, des manifestations plus modestes se sont également déroulées, reflétant un sentiment généralisé de préoccupation au sein de la population israélienne. Ces manifestations ont été déclenchées par une série d'événements préoccupants, notamment la visite controversée du ministre de la Sécurité nationale, Ben Gvir, sur l'esplanade des Mosquées, qui a attisé les tensions intercommunautaires.
Pour les groupes d'influence, ces manifestations ont été des opportunités cruciales pour faire entendre leurs voix et exercer une pression sur les autorités. Les organisations de la société civile, les mouvements politiques et les groupes de défense des droits de l'homme ont joué un rôle central dans l'organisation et la mobilisation de ces manifestations, mobilisant efficacement la population et attirant l'attention sur les questions importantes. Ces groupes ont utilisé les manifestations comme plateforme pour exprimer leurs préoccupations et leurs revendications, défendant les droits démocratiques, la justice sociale et la paix dans la région. De plus, ces manifestations ont été largement couvertes par les médias nationaux et internationaux, amplifiant ainsi l'impact et la visibilité des messages des manifestants.
En février 2023, une autre manifestation d'une ampleur encore plus grande a eu lieu devant la Knesset à Jérusalem, attirant plus de 100 000 personnes. Cette manifestation était dirigée contre des projets de loi visant à restreindre l'indépendance de la Cour suprême d'Israël, suscitant de vives inquiétudes quant à l'avenir de la démocratie en Israël. Les manifestants ont bloqué des routes principales et ont confronté les législateurs du gouvernement, soulignant ainsi leur détermination à défendre les institutions démocratiques du pays. Ces manifestations ont souligné l'importance de l'engagement citoyen et de la mobilisation populaire dans la lutte pour la démocratie et les droits fondamentaux en Israël.
Aubert Hugo, Le Dantec Julien, Vieillard Térence
Comments